Mario Giacomelli

Hommage à Spoon River

Mario Giacomelli

Né en 1925 (Senigallia, Italie) et mort en 2000

Hommage à Spoon River de Mario Giacomelli. Créée entre 1968 et 1973, Caroline Branson da Spoon River est une série méconnue du maitre de la photographie italienne, disparu en l’an 2000 et célèbre pour ses rondes de séminaristes, ses portraits de paysans et de vieillards éhontés à l’hospice et ses paysages de campagne transalpine labourés par les sillons des machines agricoles. Inspirée de Caroline Branson, un poème issu de l’Anthologie de Spoon River, un classique de la littérature postromantique américaine publié par Edgar Lee Masters en 1915 et traduit par Cesare Pavese en 1943, la série met en scène deux jeunes amants rencontrés par l’artiste en 1968 dans les environs de Senigallia : Leonardo et Mara.Lire la suite

Mais le maestro va plus loin qu’une simple prise de vue, avec deux amants, sur les bords de la rivière Misa, qui traverse Senigallia. Dans une conversation avec l’historien Arturo Carlo Quintavalle, il raconte : « Le premier résultat était mauvais. Je n’avais rien compris. Les images étaient beaucoup trop réalistes. » La série telle que nous la connaissons aujourd’hui ne se dessine que plus tard, entre 1971 et 1973, dans le secret de la chambre noire. Leonardo et Mara se métamorphosent alors dans les souvenirs de l’artiste : surimpressions, superpositions, distorsions étranges, ajouts d’épreuves postérieures, comme les touches finales d’une peinture qui n’est pas terminée.  

Giacomelli reconstruit le discours avec son imagination et ses propres souvenirs. Traduisant sur le papier ses propres projections mentales. « A la première personne je revivais alors moi aussi ces amours. Et les images se sont déplacées de l’espace du réel vers celui du souvenir. »  

Pour le professeur Carlo Bugatti, directeur du musée de la photographie de Senigallia, l’hommage de Giacomelli à Caroline Branson de Spoon River est fondamental dans l’histoire de la photo italienne. 

« Parce qu’il est l’un des premiers à s’inscrire dans la tradition du récit photographique (« Il racconto fotografico ») telle que théorisée par Luigi Crocenzi, où priment la subjectivité et les sensations de l’auteur ». Avec cette idée d’un fil, d’une séquence narrative liant les images les unes aux autres. Sans instant décisif, comme  si la série était une longue phrase chantée par le photographe.